Deux mois de prison seulement pour onze années d'enlevement parental!
Xavier Fortin, qui a vécu dans la clandestinité avec ses deux fils pendant onze ans, s'est présenté à la barre comme l'authentique victime d'un imbroglio judiciaire .
Le procureur de la République qui l'avait expressément demandé et avait requis une peine de 2 ans de prison dont 18 mois avec sursis, soit 6 mois ferme.
Soustraction d'enfants : deux mois ferme contre le père
17/03/2009
L'oeil sombre et la mine brouillée, Xavier Fortin peine manifestement à comprendre ce qui lui vaut de comparaître devant le tribunal correctionnel. Mieux, ce quinquagénaire au verbe hésitant se présente à la barre comme l'authentique victime d'un imbroglio judiciaire face auquel il n'a eu d'autre choix que de soustraire, un jour de janvier 1998, ses deux fils à leur mère. Poussé dans ses retranchements, il lâche même sans ciller : « Dans cette histoire, c'est moi qui ai perdu douze ans de ma vie et si je l'ai fait, c'est parce que je devais assumer la légitime défense de mes enfants. »
Face à lui, dans la salle d'audience surchauffée et envahie par son comité de soutien, la présidente Emmanuelle Bessone ne semble guère convaincue. Patiemment, elle s'efforce de reconstituer l'histoire du douloureux conflit opposant cet éleveur bio à la femme qui, après avoir vécu à ses côtés pendant une dizaine d'années, a soudain décidé de le quitter en 1996.
La présidente : « Par conviction, vous viviez dans un endroit où il n'y avait ni eau ni électricité. Pouvez-vous comprendre qu'au bout d'un certain temps, Mme Catherine Martin ait pu juger ce cadre peu propice à l'éducation d'enfants en bas âge ? »
Fortin, impavide : « Bien sûr, mais du jour au lendemain, elle s'est mise à avoir des prétentions totalement incompatibles avec mes moyens et mes choix de vie. »
En filigrane de la procédure, apparaît la litanie des petites mesquineries et des vrais coups bas dont les vraies victimes ont, à l'évidence, été Okwari et Shahi Yena Fortin, alors âgés de 5 et 7 ans. Des mois durant, chacun des deux parents a tenté de détourner à son avantage les décisions du juge aux affaires familiales. À l'initiative de leur mère, les deux bambins ont été entendus par les gendarmes du Var auxquels ils ont raconté que leur père les faisait boire, fumer et voler dans les magasins. À entendre Xavier Fortin, au contraire, ceux-ci ne supportaient pas de vivre avec leur mère si bien qu'il s'est cru autorisé à les entraîner dans la clandestinité.
«Double peine» pour la mère !!
Doté d'une personnalité «peu souple» selon l'expert qui l'a récemment examiné, Xavier Fortin affirme aussi, en contradiction avec le dossier, avoir constamment tenté d'établir une médiation avec son ex-épouse, Catherine Martin. En outre, il soutient avoir agi avec pour seul objectif de «préserver le libre arbitre» de ses deux fils - qui semblent pourtant, aujourd'hui encore, vivre sous son étroite emprise psychique. Cherchant sans répit à fendre la carapace des deux enfants, la présidente leur a d'ailleurs lancé, mardi : «Votre mère ne vous a-t-elle jamais manqué ?»
À la barre, Shahi Yena a tout juste pris le temps de réfléchir, avant de répondre : «Si… Mais j'ai l'impression qu'on ne s'en tire pas trop mal.» Puis, plus elliptique : «Tout le monde peut faire des erreurs.»
Avant de requérir deux ans d'emprisonnement dont dix-huit mois avec sursis, le représentant du ministère public a souligné que «la mère de ces enfants vit une double peine dans la mesure où elle ne pourra renouer avec eux que si Fortin retrouve la liberté».
Xavier Fortin, qui a déjà purgé sa peine en détention provisoire, a quitté la prison de Draguignan, mardi soir.
Cyrille Louis
La mère : «Mon cauchemar vient de prendre fin »
Catherine Martin, la mère des deux garçons, n'a cessé d'espérer pendant ces 11 longues années. Aussi quand le procureur de la République de Foix lui a téléphoné samedi pour lui dire que « peut-être » ses enfants avaient été identifiés et retrouvés, elle s'est précipitée à Foix où elle est arrivée dans la nuit. C'est donc au commissariat qu'elle a retrouvé ses garçons. «Cette femme, confiait le procureur Leroy, a vécu un cauchemar de onze années. La rencontre avec Shahi-Yena et Okwari a eu lieu à deux heures du matin dans des circonstances particulières ». Depuis ce moment, évidemment, les garçons et leur mère ne se quittent plus. Hier, en début de soirée, ils ont eu l'autorisation tous les trois de rendre visite à Xavier Fortin à la prison de Foix.
Selon le maire des Adrets de l'Estérel, Catherine Martin n'a jamais baissé les bras. «Il y a trois ans, elle avait écrit une lettre à Mme Chirac. C'était un appel à l'aide».
Aujourd'hui, le père sera transféré à Draguignan, où il avait été condamné en 2007 à une peine de deux ans de prison ferme pour « soustraction d'enfants ».
Un nouveau procès, en sa présence cette fois-ci, aura lieu à Draguignan à la fin du mois de février pour définir la peine qui sera la sienne maintenant qu'il est retrouvé. Pour la mère des garçons « enfin, l'enfer est fini ».